Un article de l’hebdomadaire de qualité Alpes et Midi, paru le 28 octobre dernier, intitulé Disparition de la lavande ?, se fait l’écho d’une controverse, comme il y en a souvent sur certaines initiatives européennes, réelles ou supposées.
Dans le cadre du Pacte vert, l’une des compétences confiée à la Commission par les chefs d’États et de gouvernements, est de renforcer la protection des consommateurs et de l’environnement et d’interdire des produits et substances chimiques nocifs, fabriqués par l’industrie chimique et dont il est avéré qu’ils nuisent au système immunitaire, qu’ils sont des perturbateurs endocriniens ou des agents cancérigènes. Une étude récente publiée dans la revue Prescrire rappelle, -ce que l’on sait depuis longtemps-, que les huiles essentielles extraites de nombreuses plantes aromatiques (lavande, thym, menthe, etc.) peuvent provoquer des allergies ou des intoxications aigües si elles sont « consommées en dehors de conditions normales d’utilisation », de façon abusive comme certains cosmétiques utilisant ces huiles ou de façon accidentelle (par exemple par des enfants). Les experts et spécialistes en phytothérapie cités par l’article, reconnaissent que ces huiles font l’objet de surconsommations pouvant provoquer des allergies et que le problème réside davantage dans la maitrise de la consommation et de l’utilisation de ces huiles essentielles que de leur production.
Selon les professionnels, la CE « va analyser chacune des quelques 600 molécules dont se composent ces huiles avant d’être mises sur le marché, pour vérifier qu’elles ne sont pas allergènes, cancérigènes, ou qu’elles ne sont pas des perturbateurs endocriniens et elle va refuser de considérer les huiles essentielles comme une substance globale». Craignant que les fabricants de cosmétiques vont renoncer à utiliser l’huile de lavande naturelle, ils en concluent qu’ « en 2022, une réglementation européenne va interdire la culture de la lavande ». Et ils se mobilisent : panneaux « Lavande en danger » au bord de champs ; pétitions en ligne, articles de presse, tel que celui cité, qui rapporte les inquiétudes de producteurs locaux.
Or comme l’article le mentionne en un court paragraphe, la CE a répondu à ces accusations qu’ » elle ne veut pas interdire les huiles essentielles ni de lavande, ni de thym, ni de romarin. Et qu’elle consultera très largement tous les acteurs du secteur." La représentation de la Commission européenne en France précise que contrairement à ce qu’ont annoncé certains professionnels de la filière « 'il n'y aura aucune proposition législative sur ce sujet en 2022 ». Proposition qui, si elle était faite, devra « être discutée puis adoptée par le Parlement européen d’un côté, et par le Conseil qui réunit les 27 Etats membres de l’autre » Et elle suggère que si une telle proposition d’interdiction de la lavande était formulée, elle serait rejetée par le Parlement européen et par les gouvernements. La Commission européenne conclue que les craintes des professionnels français de la filière des huiles essentielles sont infondées. Ce qui n’a pas troublé les conseillers départementaux qui ont voté à l’unanimité une déclaration qui dénonce un risque d’interdiction… que la Commission Européenne n’a pas envisagée.
Avant de relayer des inquiétudes et des déclarations largement imaginaires et injustifiées de producteurs, dont la soi-disant loi européenne imaginaire continue de « faire frémir les producteurs », la presse ne devrait-elle pas d’abord vérifier la véracité des faits ?. C’est ce qu’a fait Ouest France dans un article publié le 28 juillet dernier :
https://www.ouest-france.fr/europe/ue/non-la-commission-europeenne-ne-veut-pas-interdire-l-huile-essentielle-de-lavande-54e6e284-efad-11eb-b392-b52b571b94f4
L’auteur conclut qu’ « avec un argument qui n’a pas été corroboré par des faits, les professionnels craignent que des produits naturels vont se retrouver sur liste noire et, même si légalement il n’y a pas d’interdiction de les utiliser, aucun fabricant de cosmétique, de parfumerie ou de produits alimentaires ne les utilisera » ; qu’à ce jour, une réglementation européenne est infondée et que « Non, la CE ne veut pas interdire l’huile essentielle de lavande».
Jean-Pierre Pellegrin
Membre du conseil d'administration de la Maison de l'Europe de Gap et des Alpes du Sud