Il y a cent ans nos ancêtres célébraient la fin de la guerre, un conflit qui fit plus de 18 millions de morts. Qui eut cru à cette époque que 21 ans plus tard éclaterait le conflit le plus meurtrier de tous les temps : la deuxième guerre mondiale qui fit plus de 60 millions de morts.
Si nous devons déplorer plus de 80 millions de morts en 30 ans c'est parce que la première guerre mondiale s'est terminée non pas avec le souci d'établir la PAIX mais avec une recherche de vengeance de la part de ceux qui avaient été battus.
Fort heureusement pour les générations qui suivirent la deuxième guerre mondiale, celle-ci s'est conclue avec le souci fondamental d'établir une paix durable. Ceux que l'on appelle « les pères fondateurs de l'Europe », les Français Jean Monnet et Robert Schuman, l'Italien Alcide de Gasperi , l'Allemand Konrad Adenauer, le Belge Paul-Henri Spaak avaient compris qu'une paix durable ne pouvait être acquise qu'en mettant en commun les intérêts des Etats d'Europe, en développant une société démocratique fondée sur la liberté et le progrès et en plaçant progressivement les Etats dans la perspective d'une fédération plus intégrée de nos nations respectives. C'est ce qui fut amorcé avec six Etats fondateurs, rejoints peu à peu par 21 autres nations en fonction de leur propre histoire.
Grâce à cette vision, à cette ambition, à cette réalisation, certes incomplète et non sans reproches, nous bénéficions de la paix depuis 74 ans qui succède à une période qui a été le théâtre de 3 guerres majeures : la guerre de 1870 et deux guerres mondiales, en 74 ans également.
C'est une évidence : les peuples qui ne disposent pas d'institutions communes intégrées, qui n'envisagent pas l'avenir sous la forme de la défense de leurs intérêts communs finissent toujours par se faire la guerre.
Qui plus est, face à la mondialisation, face aux grandes puissances, aucun Etat d'Europe ne pourra s'en sortir seul : « C'est en étant d'avantage européens que nous pourrons rester souverains ».
Or on constate hélas depuis une décennie, sous l'effet de l'explosion démographique mondiale, du réchauffement climatique, de la crise économique de 2008, un retour au nationalisme, au populisme et même pire : qui eut cru il y a 50, 30 ou 20 ans que certains puissent à nouveau se réclamer du nazisme ! Un grand danger est en train de naître et de se développer.
Serons-nous suffisamment lucides, courageux, déterminés pour y faire face, relever le défi et ouvrir nouvelles décennies de paix et de progrès ? Pour cela il faut améliorer et accélérer la construction de l'Europe plutôt que de se replier sur chacune de nos nations.
Pierre Bernard-Reymond,
Ancien secrétaire d'Etat aux Affaires Européennes
Ancien parlementaire européen.